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mardi 5 mai 2009

Mademoiselle Obscure Précaire, Sa vie, son œuvre.


Vous l’avez certainement déjà croisée… Mais si… Vous savez bien… Vous ne connaissez qu’elle… La célébrissime Mademoiselle Obscure Précaire!

A ce jour, quelques zones d’ombre demeurent encore sur la biographie de Mademoiselle Obscure Précaire – d’aucuns disent qu’elle aurait (déjà) participé à l’enquête de Claude Lévi-Strauss sur les Nambikwaras lors du séjour du Grand Homme au Brésil, entre 1935 et 1938. Certaines photographies semblant représenter Mademoiselle Obscure Précaire en qualité d’assistante du grand homme, sous l’avatar discret du singe Lucinda (car la discrétion et la modestie furent toujours la caractéristique la plus absolue de Mademoiselle Obscure Précaire), semblent attester cette version, tandis que d’autres prétendent que, toute petite déjà, Mademoiselle Obscure Précaire s’embarquait aux côtés de Marcel Griaule et Michel Leiris pour la fort séminale « expédition Dakar-Djibouti ». Certains affirment que cela est absolument impossible, puisque, à l’époque, Mademoiselle Obscure Précaire fréquentait assidûment les cours de paléographie de l'Ecole des Chartes... D’autres pensent au contraire que Mademoiselle Obscure Précaire était, dès ses années de formation, résolument sociologue, avec un goût accru pour sa propre société : disciple d’Auguste Comte et Durkheim, elle aurait vigoureusement lutté pour l’avènement d’une science sociale émancipée de la philosophie. Certains toutefois prétendent à l’inverse que Mademoiselle Obscure Précaire est philosophe et entend bien le rester, fille spirituelle  ad vitam aeternam d’un Deleuze, ou d’un Guattari ! Tandis que d’autres affirment que Mademoiselle Obscure Précaire a toujours été, et sera toujours, linguiste chevronnée, et qu’elle travailla avec M. Ferdinand de Saussure, alors que certains voudraient cantonner Mademoiselle Obscure Précaire à l’histoire et réduire son héritage à celui pieusement reçu des mains de Braudel… Certains racontent que Mademoiselle Obscure Précaire a eu le privilège, partagé par quelques économistes des plus chevronnés, de serrer « la main invisible du marché », d’autres encore supputent que Mademoiselle Obscure Précaire eut une formation initiale en littérature, en géographie, en droit, en philologie, en archéologie, en démographie…

Qu’importe ?

Toujours est-il que Mademoiselle Obscure Précaire, fille spirituelle de tous ces pères fondateurs et de tant d’autres encore, est, plus vraisemblablement, née après mai 1968 (un peu après ? longtemps après ? là encore, les interprétations divergent). Elle  a (passionnément) lu tous les auteurs dont les noms précèdent, et, comme vous ne l’ignorez pas,  tant d’autres encore qu’il serait absolument impossible de les citer tous. Comme vous n’êtes pas non plus sans le savoir, Mademoiselle Obscure Précaire assure, à elle seule, près de la moitié des enseignements à l’université, où elle assume également l’évaluation des étudiants, la direction de leurs mémoires, organise des coopérations internationales, participe aux tâches administratives qui permettent le bon fonctionnement des établissements, assiste aux réunions pédagogiques… Travailleuse acharnée, elle mène sans relâche ses recherches personnelles, souvent novatrices, dans tous les domaines des sciences humaines et sociales. Mademoiselle Obscure Précaire est sur tous les fronts : elle organise colloques et journées d’étude, auxquels en outre elle apporte le jus d’orange - sans jamais oublier les cacahouètes -, impulse des projets, monte des numéros spéciaux de revues, publie des actes, des articles, des livres, rédige des rapports, trouve encore le temps de soutenir des thèses… ; elle a  exploré, voire éclusé, tant de terrains, de fonds d’archives, de données statistiques, de correspondances, de cartes, de schèmes, de textes, d’entretiens, de plans, de discours, d’ouvrages, de directives, de photographies, d’œuvres littéraires ou iconographiques, qu’il n’est plus ni d’aire géographique, ni d’époque, ni de théorie, concept, méthode ou paradigme qui lui soit étranger.... voire ne lui doive quelque chose!

Si bien qu’à l’évidence, Mademoiselle Obscure Précaire se pose, et surtout s’impose, aujourd’hui, le plus légitimement du monde, comme LA prétendante au « Prix Claude Lévi-Strauss de l’Académie des Sciences Morales et Politiques », ainsi qu’au « Prix Clo-Clo de la Meilleure Poire », doté d’un montant de 100 000 clopinettes, qui lui sera sans aucun doute décerné, le 29 juin prochain, par Madame Valérie Bougresse, Ministre de l’Abolition de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur, et par Monsieur Aéres, Président d’Honneur de l’Agence d’Evaluation de la Hauteur des Talonnettes,  pour sa contribution inégalée et inégalable à « l’évolution significative des méthodes ou des approches en sciences sociales et humaines ». Mademoiselle Obscure Précaire a en effet indubitablement « acquis une forte visibilité internationale, dépassant très largement les frontières de sa propre discipline ». D’ailleurs, son « facteur h » ne souffre tout simplement aucune comparaison. Elle est jeune (de moins en moins), il est vrai; mais aux âmes bien nées la valeur n'attend point le nombre des années... Elle envisage de prendre un quatrième emploi (des collègues lui ont dit que les caissières de Carrouf' ont des réductions sur les plats préparés à 0%, dont elle fait grande consommation entre deux tablettes de chocolat), pour financer la congélation de ses ovules  dans une clinique américaine.

 Toujours humble et dévouée, Mademoiselle Obscure Précaire n'hésite pas à payer de sa personne, travaillant plus souvent qu’à son tour dans le noir et sans chauffage, car elle ne voit pas pourquoi le Contribuable Inconnu, en ces temps de crise, devrait financer de ses deniers un bureau pour stocker sa bibliothèque, ses cours (ceux reçus, et ceux dispensés), ses matériaux, les innombrables versions de sa thèse, celles non moins pléthoriques de ses publications. Mademoiselle Obscure Précaire est pour le travail le dimanche, car il y a beau temps déjà qu’elle agrémente ses week-ends en travaillant chez Ikea, place que nombre de ses collègues précaires de l’universalité des savoirs lui envient, en raison de l’accès privilégié qu’elle lui donne à une ressource inestimable : le crayon de papier.

D’un enthousiasme sans faille, éternelle curieuse, penseuse toujours aux aguets sur le monde qui l’entoure, Mademoiselle Obscure Précaire, lorsqu’un étudiant candide lui demande si c’était chouette, le vingtième siècle, ce que c’était ce truc, le Céhennairesse, et si ça se passait en même temps que les Ancyclopédhistes et les dinausores,  Mademoiselle Obscure Précaire, donc, sent parfois poindre à l’horizon un tantinet de lassitude, un soupçon de découragement, voire le risque, dans son obscure clarté, de tomber des étoiles… Alors, s’abandonnant l’espace d’un instant aux délices de la nostalgie, Mademoiselle Obscure Précaire hurle à la lune en Place de Grève… Oh! combien d'actions, combien d'exploits célèbres
sont-ils demeurés sans gloire au milieu des ténèbres ?Mais l’on a peine à haïr ce qu'on a bien aimé, et le feu mal éteint est bientôt rallumé…. 

Mademoiselle Obscure Précaire retourne bien vite travailler d’arrache-pied pour mettre la dernière main à son prochain ouvrage, « Les allogènes de la République », qu’elle dédicacera à son frère jumeau, le non moins fameux et non moins prolifique Doc’ Postdoc Inconnu…

Il est donc une chose sûre et certaine, c’est que jamais, au grand jamais, Mademoiselle Obscure Précaire n’a l’impression de tourner en rond !

Si vous avez des informations complémentaires sur les pans entiers de sa biographie jusqu'ici injustement demeurés dans l'ombre, envoyez vos commentaires dans les rubriques afférentes.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

"Délivrez-nous Sainte Précaire"

Voici une prière de circonstence qui nous vient du TàD (Terrain à Déminer)
« Délivrez-nous Sainte Précaire,
maintenant que nous sommes vivants,
des turpitudes intellectuelles
qui nous rendent lucides sur la cruauté du monde.
Permettez-nous de ne plus analyser le monde social,
D’accepter les hiérarchies, de nous soumettre aux puissants,
De façon à nourrir nos proches, nos enfants,
Sans se compromettre aux yeux de notre Seigneur.
Donnez-nous aujourd’hui les certitudes d’un monde figé,
Pour que nous puissions dresser nos frères
et répondre à la demande du marché.
Nous oublierons les enseignements passés, les connaissances usées,
Pour nous plier aux normes et aux règles de l’évolution »

Plus de renseignement ici : http://terrainademiner.blogspot.com/

Le TàD est une association loi 1901 qui a pour buts : 1) L’insertion professionnelle des jeunes chercheurs en sciences sociales : en les fédérant, à la fois localement et en réseau, pour permettre une meilleure circulation de l’information qu’elle soit d’ordre scientifique, politique, administrative. En mettant en valeur leurs recherches et par là-même leurs compétences dans leur champ d’étude ainsi que dans d’autres domaines, par l’échange des savoirs et savoir-faire recensés dans le groupe ; 2) Favoriser l’accès à la connaissance socio-anthropologique et transmettre des outils d’innovation sociale : en recherchant et créant de nouveaux moyens d’approche et de diffusion des disciplines auprès de publics divers ; En faisant intervenir le regard socio-anthropologique en dehors de l’université et des écrits scientifiques, et en donnant une approche pluridisciplinaire et non exclusivement académique aux sciences sociales.